lundi 30 septembre 2013

Prisonniers de la Réforme des rythmes scolaires?

Et alors cette réforme elle est bien ?
Sur le papier l’année dernière ça semblait pas mal et je me rassurais naïvement, tel un grand benêt (non sur la photo ce n'est pas moi...), en écoutant les arguments des experts en «bio rythme» ou en «rythme d’apprentissage» des enfants. Après tout cette réforme a été pensée dans l'intérêt des enfants, pour que leurs journées de travail soient moins longues et pour les ouvrir au monde et à la culture...
Mais bien souvent, la pratique diffère de la théorie.
Cela fait à présent plus de trois semaines qu’on expérimente, et même si c’est un peu court pour en tirer des conclusions ça donne quand même un petit aperçu qu’il me faut partager.
Mon inquiétude a commencé un peu avant la rentrée, quand j’ai appris le faible temps de formation (une demi journée) dont avaient bénéficié le personnel en charge des 45 min quotidiennes de TAP (Temps d’Activités Périscolaires) de ma ville.
Dans la plupart des cas, c’est le personnel ATSEM (agent territorial spécialisé des écoles maternelles) qui a en charge ce nouveau créneau horaire. Pour être plus clair, ce sont les "dames de cantine" ou "dames de ménage" ou les personnes qui s'occupent de la garderie. Donc, hop hop hop, je finis vite fait le ménage de la cantoche et je me transforme comme par enchantement en super animateur éducateur pour gosses ! Attention, je ne dis pas qu’il n’y a pas de compétence, ni de bonne volonté de leur part. Mais au regard du peu de temps de formation dont ces personnes ont bénéficié, il est impossible d’atteindre les objectifs ambitieux évoqués par les experts théoriciens.
Un autre point. Chez nous l’école commence 15 minutes plus tôt que l’année dernière et il y a 4,5 jours d’école par semaine (versus 4 l’an passé). Moi je veux bien croire que c’est mieux de travailler le matin plutôt que l’après midi, mais dormir c’est bien aussi. Bon d’accord, alors il faut les coucher plus tôt qu’ils nous disent. Et bien oui ça aussi c’est un excellent conseil, sauf que quand tu ne finis pas ton travail à 16h30, qu’il faut gérer les devoirs, la préparation des sacs pour le lendemain, le repas, les fringues, la toilette, l’histoire guili bisous dodo et tout ça pour tes trois loulous, il arrive parfois que le timing dérape légèrement. 
Et paf tout fout le camp, on s'éloigne un peu plus du pays des Bisounours ! Exit la pause du mercredi matin, à la place, à l’heure du garde à vous, tu te payes une brochette de têtes dans le cul mal réveillées avec méga cernes en face de toi au petit déj ! Aller aller les enfants, direction l’école !! Sisisi, c’est pas évident comme ça à première vue mais là vos cerveaux seront bientôt au top pour retenir ce que vont vous expliquer vos instits.
Le constat général est sans appel, après trois semaines d'école, les enfants sont crevés!
Sinon en ce qui concerne les activités des TAP, c’est "tip top". Ma fille de 9 ans doit s’entraîner d’arrache pied aux championnats du monde de balle au prisonnier puisque cela fait plus de 15 jours qu’elle fait cette activité pendant son TAP. Autrement, il y a "jeux de société", "béret", "hip hop", "chaises musicales" et aussi "théâtre" pour faire bien... "Ouverture au monde et à la culture" qu'ils disaient... Ce qui est sympa c’est qu’après les TAP il y a garderie et qu’ils peuvent continuer à faire exactement la même chose… Je pense qu’à ce rythme ma fille a toutes ses chances pour une médaille!
Impossible de savoir ce que fait la plus petite qui a 5 ans. En réalité, je crois qu’elle n’a rien fait. D’ailleurs nous venons d’apprendre qu’ils arrêtaient les TAP pour les maternelles parce que le temps de faire l’appel, d’emmener les enfants faire pipi, d’installer une activité, de ranger, et de refaire l’appel à la fin, il ne restait que trop peu de temps pour faire quelque chose ! Evidemment, les penseurs de la réforme n'avaient pas pensé à ça...
Je passe rapidement sur le fait que les personnels en charge des TAP, quelque peu livrés à eux-même et au regard exigeant de parents inquiets, ont du supporter la forte pression d’une mise en place ratée. Je passe aussi sur la difficulté des parents à communiquer avec les enseignants qui, terminant plus tôt (je précise ici qu'ils ne travaillent pas moins puisqu'ils ont classe le mercredi matin), ne font plus systématiquement la sortie des classes.
Voilà pour l’aspect pratique des choses.  
Alors si on pense que l’idée de base conduisant à la réforme est bonne pour nos enfants, le temps de formation des animateurs, les moyens matériels mis à disposition sont insuffisants, et l’organisation  est à revoir en profondeur et pas en surface.
Nul doute que le maire de ma ville, lui même ancien enseignant et "oreille" du Président Hollande, saura écouter les problèmes évoqués et ne baissera pas pavillon pour faire en sorte que les choses s'améliorent. 
Une dernière remarque sur le coût de cette réforme en cette période de forte augmentation de la pression fiscale. Bizarrement, les politiques n’évoquent pas ce point et sans être un spécialiste (je ne sais que payer…), les heures payées aux personnels des TAP le seront tôt ou tard grâce à l’augmentation des nos impôts locaux (l’Etat décentralise). Alors allons y gaiement Vincent, payons !

Bon vous me direz, je râle c’est vrai, mais si grâce à tout ce chambard ma fille devient championne du Monde de balle au prisonnier, on aura déjà bien avancé… 


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Quelques réflexions sur le sujet au Café Pédagogique

lundi 23 septembre 2013

Un taxi parisien

Le week-end dernier, j'ai fait un bref séjour à Paris. Au programme visite du passionnant musée des Arts Primitifs quai Branly, soirée et dodo chez sister Lolo, puis virée en région parisienne pour récupérer une Twingo.
Je dois récupérer le bolide à Marly La Ville, dans le 95. Comme c'est à plus de deux heures de chez ma sœur en s'enfilant un cocktail complet de transport en commun (tramway, RER, métro, train de banlieue), j'adopte une stratégie plus simple. Joyeuse traversée de Paris en RER jusqu'à Charles de Gaulle pour me rapprocher puis taxi. Efficace. Bon, je me galère un peu à trouver un tacos mais je finis par caser mes grands pinceaux dans un C4 Picasso conduit par un petit gros. Je suis un peu déçu car j'aime bien profiter de me payer un taxi pour rouler en Audi ou en Benz Benz Benz! Et me voilà parti pour un périple interminable...
Comme le type ne connait pas le bled où je vais, il tapote l'adresse sur son GPS TomTom. Calcul de l'itinéraire, pas de péage, pif paf pouf, on est à 14 km du but et on en a pour 23 minutes. Relax, je m'avachis tranquilos sur la banquette en skaï (le skaï c'est comme le cuir sauf que dès que tu bouges les fesses on croit que tu pètes...) en grignotant un Nuts et en me grattant les noisettes. Mais on n'a pas fait 500 mètres que les keufs m'arrêtent le type râle déjà après son GPS qui cherche sa position l'espace d'un instant. Son TomTom le gonfle et sans plus attendre, le taxi man décide de se la jouer à l'instinct : "On va passer par l'A86" qu'il me dit. Je ne réponds rien car pour moi c'est du chinois. Et hop c'est parti, bretelle d'accès, voie d'accélération, et paf bouchon. Bingo! J'suis tombé sur un as du sixième sens, le roi du plan foireux. Ça finit par avancer doucement, on roule un peu, je surveille le GPS d'un oeil et je commence à m'inquiéter quand je m'aperçois que le type ne suit pas les indications du TomTom. Je me dis qu'il est vraiment Con Con et je l'interpelle quand je vois que la distance jusqu'à l'arrivée est à présent de 30 km. "On est à combien de km de l'endroit où je veux aller ?" Il me dit qu'il ne sait pas, je lui réponds que c'est marqué sur son GPS, il me dit que c'est la distance aller retour et je lui demande de ne pas me prendre pour un con. "Ne vous inquiétez pas, on va prendre un raccourci". Je bouillonne, ce mec me met la fièvre.
Il quitte l'autoroute aussi sec. Inspiration divine? Un instant, je me dis que si ça se trouve je suis tombé sur le roi du chemin le plus court. Un instant seulement. Le compteur indique 40 euros, on est parti depuis trois quart d'heure, on a déjà fait 30 km et le GPS indique qu'on est à 40 km du but!!! On est à Eaubonne mais moi je l'ai très mauvaise. 

Je lui dis qu'on est à pétaouchnok et pas du tout où je veux aller, donc soit il me dépose de suite et je ne le paye pas, soit il se décide enfin à suivre les indications de son GPS à condition qu'on se mette d'accord sur le prix de la course. Il me propose 50 euros et je lui dis que je ne lui filerai pas plus de 40 euros et que j'ai autre chose à faire que de visiter la banlieue Nord en mode Seine Saint Denis Skaï. Je regrette de n'avoir pas pensé à faire appel à Uber Popopopopop!!!!!!!!
Il me fait le coup du type désolé, qu'on est quand même dans le 95, genre il est pas si nul que ça. Je lui dis que le 95 c'est grand et que je ne lui ai pas demandé d'en faire le tour. Il me dit qu'il est taxi parisien et pas taxi de banlieue et ferme enfin son clapet pour se concentrer sur la technologie. Ce gars est con comme une valoche !
Une fois arrivé à destination, après deux heures de trajet et 70 km de route, son compteur indique 115 euros. Je lui pose alors une question : "Bon en fait cette course de 14 km, elle aurait du me coûter combien ?","Ben je ne sais pas" qu'il ose me répondre. Je lui dis que décidément soit il me prend pour une andouille, soit il ne sait pas grand chose, que moi j'ai bien regardé son compteur et que c'est une course d'une vingtaine d'euros maxi. Je lui file 30 euros, bon prince au regard du temps que j'ai perdu mais soulagé d'être arrivé parce qu'à un moment j'ai cru que j'allais y passer la journée ! Il n'est pas content du tout, il gueule, je ne peux plus le voir en peinture lui et son Picasso. Je sors de la voiture en calculant la probabilité qu'il me suive et me fasse du rentre dedans refasse le portrait façon Guernica. Vu son gabarit j'ai du souci à me faire, les petits gros et trapus c'est du genre qu'on peut pas casser en deux, c'est trop mou ! Il ne bronche pas donc en guise d'au revoir et pour clore les débats, je lui demande si ça ira pour le retour...

lundi 10 juin 2013

Le maître nageur

Sans doute encouragé par la rencontre furtive d'un ancien champion Olympique de natation en boîte de nuit il y a quelques semaines, je me rends régulièrement à la piscine pour diversifier mes pratiques sportives.
Lundi dernier je vais donc à l'Aquasplash local où, en plus du toboggan, des jacuzzis, du hammam et de la piscine à vagues, il y a un vrai bassin pour nager. Ça caille toujours autant et je me délecte à chaque fois du spectacle des bonnets de bain, mais l'histoire cette fois est différente.
Après un passage à la douche obligatoire, je croise les 3 maîtres nageurs qui discutent entre eux mais daignent répondre à mon bonjour. Comme il n'y a pas grand monde, ils ont l'air un peu désœuvrés car ils ne peuvent pas s'adonner à leur principale occupation qui consiste à scanner ouvertement l'anatomie des nageuses. Ça occupe me direz-vous et il n'y a pas de mal à se faire du bien ! 
Bon, là ils s'emmerdent ferme, y'a que de la mémé, donc pas de risque de transformer le "moule bite" réglementaire en tente canadienne fraîchement montée. La tenue du professionnel c'est donc petit slipo, tee-shirt manches courtes roulées sur les épaules, claquettes Arena à picots aux pieds, sifflet autour du cou. On se croirait au camping ! Le tout avachi nonchalamment sur la chaise haute qui permet d'avoir une vue panoramique sur les petits culs la zone de baignade.
A chaque fois que je vois ces gars, je me fais deux réflexions.

1/ Y'a pire comme boulot mais ils doivent quand même bien se faire ch...
2/ Est-ce que ces types savent vraiment nager ? Je sais, j'exagère mais aucun d'entre vous n'a jamais vu un maître nageur apprendre à nager à un gosse en se mettant à l'eau, ni même (et c'est tant mieux) sauter dans l'eau à la "Baywatch" pour sauver un type qui aurait vraiment touché le fond. 

En les regardant bien de profil, l'un d'entre eux a l'air d'un ancien champion olympique de boîte de nuit qui se serait mis à la natation sur le tard.
Je me glisse dans l'eau sur ces considérations moqueuses et j'enchaîne les longueurs sur un rythme soutenu version brasse. Le crawl, c'est la classe, on est d'accord mais à condition de maîtriser la technique, ce qui n'est pas mon cas. J'ai essayé mais je ne supporte pas de mettre des lunettes et après une série de mouvements désordonnés et moultes éclaboussures, je finis la longueur essoufflé comme un boeuf, l'estomac et les oreilles remplis d'eau chlorée. Le genre veau marin !
Vous l'avez deviné, je préfère l'élégance et c'est donc coiffé de mon bonnet vert que je brasse, telle une grenouille, dans une des lignes d'eau réservée aux nageurs, l'autre partie du bassin étant à disposition des touristes et autres lambins aquatiques. Nous ne sommes que 3 ou 4 à nous partager cet espace, c'est rare et agréable. Trafic fluide, pas d'embouteillage, chacun peut nager à son rythme et doubler sans déranger les autres.
Soudain, alors que je reprends mon souffle après une série de longueurs endiablées, j'aperçois un des maîtres parleurs qui enlève son tee-shirt, ses claquettes, ajuste popol dans son mini slipo et sa tête dans son bonnet (ou le contraire). Mince alors me dis-je, il ne va pas se foutre à l'eau au moins ! J'ai presque envie de lui dire de faire gaffe, qu'il faut savoir nager quand même et qu'il a oublié de mettre ses flotteurs, mais je me retiens. Je m'apprête quand même à intervenir au cas où... C'est alors qu'il s'approche de moi bombant son torse grassouillet tel un Apollon sur le retour. Il me fixe d'un drôle de regard avec ses mini lunettes miroir et les yeux dans les yeux (ou plutôt mes yeux dans mes yeux) me tient à peu près ce langage :  
" Vous savez que vous êtes dans une ligne d'eau pour nage rapide. Vous pouvez aller à coté, c'est pour la nage lente"
Pour c(h)lore le tout il enchaîne par un plongeon plein d'assurance suivi d'un crawl sacrément efficace me laissant planté là. Vexé comme un pou et penaud je change d'endroit bêtement, laissant au propriétaire des lieux la ligne d'eau quasiment déserte. J'avais déjà un peu chaud mais là je fulmine. Je n'ai même pas eu l'occasion de lui balancer une des réparties bien senties dont j'ai le secret... en général dans l'heure qui suit. Tiens j'ai bien envie de lui demander poliment où se trouve la ligne d'eau réservée aux gros connards en lui disant qu'il y serait à sa place. Mais le gars ne s'arrête pas, il sort à peine la tête de l'eau pour respirer. Il est en mode torpille comme on dit dans le jargon.
Je termine donc ma session en mode boulet au milieu des "culs de plomb" et autres amateurs de nage indienne.
Moralité : Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin... elle sait nager !

Pour finir, voici une petite fable revisitée :

Maître nageur, sur sa chaise perchée,
Tenait en son bec un sifflet.
Maître moqueur, par le tableau amusé,
Lui tint à peu près ce langage :
"Hé, bonjour Monsieur du plan d'eau
Que vous sifflez fort! Quelle maîtrise de l'appeau! 
Sans mentir, si votre nage 
Se rapporte à votre puissant ramage 
A une cédille près, vous devez flotter sur l'eau à la vitesse du çon!"
A ces mots, Maître nageur ne se sent plus de colère; 
Et pour montrer sa belle technique,
Il ouvre un large bec, laisse tomber son sifflet (le con!).
Le moqueur s'en saisit et dit :
"Mon bon Monsieur, apprenez que tout persifleur 
Vit au dépend de celui qui l'amuse :
Cette leçon vaut bien un sifflet sans doute"
Le nageur, moqué mais pas vaincu,
Plongea certes un peu tard, et ainsi flottant, en crawl disparut.

mercredi 20 mars 2013

Coeurs fatigués


Voilà, ça y est je suis un petit vieux. Je n’étais pas pressé d’y être, mais ça y est je suis un petit vieux. Je n’ai pas vu le temps passer.
A présent, tout est calme autour de moi, il ne se passe plus rien. Enfin si, quand j’allume la télé pour me tenir compagnie, je vois bien que les hommes se déchaînent toujours autant. Mais je ne fais plus partie de ce monde. Ma vue a rétréci et mon horizon aussi. Dehors, ils construisent un mur mais par la fenêtre, je peux encore apercevoir la cime d’un grand arbre déplumé. Il attend le printemps. Pas moi.
On m’a oublié là, mais moi je me souviens. Je fais le bilan de ma vie, le vrai hein, pas un vulgaire point d’étape qu’on fait à mi-parcours quand on a encore l’illusion qu’on peut arranger les choses ou profiter encore un peu. Faut dire qu’à mon âge on n’a plus que ça à faire, poser ses valoches et remonter le temps. Regarder devant ne sert plus à rien et à la surface il n’y a que silence et solitude. Alors, je plonge dans les eaux troubles de ma mémoire. J’y pêche l’essentiel, les joies, les peines, la vérité des sentiments, et des détails aussi. Je les ramène à la surface, je les place dans mon bocal puis je les regarde danser devant moi toute la journée. Ca occupe, ça fait un drôle de ballet.
Hier, les heures étaient légères, aujourd’hui l’horloge n’avance plus.
Les rares fois où je sors, le regard des gens glisse sur moi sans s’arrêter. Je ne m’habitue pas à cette absence d’échange. Une fois, en sortant du bus, moi aussi j’ai glissé et je suis tombé. J’ai vu qu’on m’avait vu, j’étais un peu gêné mais personne n’a esquissé le moindre geste, chacun a vite filé de son côté. J’ai regardé mes paumes écorchées et je me suis relevé tout seul. Je ne pensais pas un jour devenir l’Homme invisible qui me fascinait tant quand j’étais enfant.
Je suis à peine une ombre, presqu’un fantôme. Déjà.
J’ai souvent regardé les vieux avec une certaine tendresse. J’aimais lorsqu’ils me racontaient leurs histoires, sinon j’observais leurs visages ridés, leurs mains et je leur imaginais une vie. Je me demandais aussi comment ça faisait d’avancer si lentement, courbé en deux, les yeux rivés sur ses pieds. Maintenant je sais, c’est ennuyant.
On a toujours dit de moi que j’étais trop sensible. Et alors? La sensibilité c’est la richesse des hommes.
Quand elle arrive chez moi, chaque semaine, l’infirmière qui s’occupe de moi s’empresse d’enfiler ses gants en latex pour me soigner. La solitude c’est contagieux… Elle fait bien son travail, cause peu et repart aussitôt. Elle doit avoir peur de s’attacher, elle se protège c’est normal… Dire que c’est elle qui me retrouvera un jour. C’est peut-être mieux qu’on ne se connaisse pas.
J’ai eu deux enfants, c’est sans doute ce que j’ai fait de mieux dans la vie. Bon, eux non plus n’osent plus me toucher. Parfois ils m’appellent, j’entends leurs voix au loin mais je ne les vois plus. Ils n’ont plus besoin de moi. Mon cœur bat encore, le leur aussi pourtant.
En fait je n’ai pas rêvé, j’ai juste traversé la vie. Jusque-là c’était bien, j’ai eu de la compagnie, j’ai pleuré et j’ai ri. En chemin, j’ai laissé une trace, petite, fragile, elle s’effacera mais pour l’instant, elle est bien là, je l’aperçois derrière moi.
Aujourd’hui, je ne suis plus personne et plus pour très longtemps. Finalement tout irait assez bien si devant moi ne se dressait pas ce mur d’indifférence. Le franchir, à mon âge ? Plutôt creuser…
Voilà ça y est je suis un petit vieux.

dimanche 13 janvier 2013

J'ai la guitare qui me démange...


Après deux années de cours de guitare à la très très cool, c'est décidé, le fiston va passer à la vitesse supérieure. Direction ce qui se fait de mieux en matière de rigueur et de professionnalisme : l'Ecole de musique. Que dis-je, le Conservatoire de musiques et d'arts dramatiques!
Dossier de pré-inscription pour la guitare en juin, commission en juillet, refus immédiat. 
On nous explique que pour cet instrument, il ne suffit pas de vouloir apprendre, il faut savoir attendre parfois 3 ans avant de taquiner le bout de bois. Pour patienter, il faut faire du solfège assidûment. Je n'étais pas contre un peu de travail suivi, mais le "priver" d'instrument, je trouve ça salop. Vous imaginez la frustration si aux sports d'hiver, le prof de ski passait uniquement les quatre premiers jours à apprendre à un débutant comment on utilise le tire fesses et ne lui permettait de faire sa première descente à ski que le dernier jour... tout ça pour qu'il se croûte la gueule vingt fois sur le verglas.  
Heureusement le prof de trombone cherche des élèves. Il a l'air sympa, mon fiston accroche, no problem pour l'inscription, l'affaire est dans le sac. Bon, il ne sait pas encore que le plan trombone sur la plage autour d'un feu ça peut être compliqué avec les filles... quoique!
Retour de vacances en fanfare. Un petit tour par l'école de musique nous apprend toutefois que le fiston n'est ni inscrit au cours de trombone, ni aux leçons de solfège. Personne n'a fait le changement de l'instrument sur le dossier initial, et pour l'administration c'est trop tard et à l'année prochaine!
Nous contournons l'obstacle car heureusement le prof de trombone est toujours dispo pour recueillir des débutants éconduits. Il va essayer d'arranger l'affaire en coulisse, c'est sa spécialité.... 
Après plusieurs visites, suppliques, réunion à base de "le solfège n'est pas une punition", un mail nous informe que le fiston est enfin inscrit pour les cours de trombone et de solfège. Youpi!
Arrive enfin le jour du premier cours de solfège, mon garçon n'est pas spécialement enchanté mais l'inverse m'aurait presque inquiété. Nous passons à l'accueil pour vérifier son inscription, la secrétaire ne trouve pas son nom, elle va chercher sa collègue qui s’occupe de rien de ça et qui nous dit que c'est bon pour lui mais que les listes ne sont pas encore à jour... Elle nous accompagne jusqu'à la salle de cours où des enfants sont déjà assis. Le mien s'installe aussi, la prof arrive après tout le monde, je quitte les lieux avec le reste de ma troupe. Direction maison, devoirs et préparation d'un délicieux gratin de courgettes. Mais déjà le téléphone sonne.
"Oui allo?"
"Mr Machin?"
"Oui c'est moi "
"C'est Mme Trucmuche du Conservatoire. Nous avons eu un petit problème avec votre fils...
Gloups
... C'est qu'en fait il n'est pas inscrit au cours de solfège, contrairement à ce que nous vous avons dit, il est sur liste d'attente..."
La dame m'apprend que la prof, ne voyant pas le nom de mon garçon sur sa liste, a choisi de ne pas le garder dans son cours. Pédagogie, épanouissement, le solfège c'est ludique, ce n'est pas une punition qu'ils disaient... 
Je bouillonne, j'écume, je fume, j'embarque ma petite fille (une sorte d'assurance vie), je retraverse la ville en version accéléré. Je vais me faire le dirlo direct, à la mexicaine ou version OK chorale Corral, lui dire ce que je pense du foutoir complet qui règne dans son établissement prétentieux. Une clé de sol peut être mais une clé de bras c'est sûr, une bonne soufflante et on verra bien où finira le trombone à coulisse...
La secrétaire m'attend avec mon garçon directement sur le parking comme s'il avait fait une connerie. C'est le monde à l'envers! En fait, c'est stratégique. Au téléphone, elle a senti que j'étais passé en mode bourrin énervé et elle veut me tenir à l'écart des bureaux où ses chefs doivent être en train de peaufiner leur "Air organisation" en jouant aux cartes. Elle est très gentille, bli bli bla bla, je vois bien qu'elle essaye de m'entourlouper version flûte enchantée. Je la remercie de s'être occupé de mon fils, mais je ne baisse pas pavillon et demande à voir un responsable de suite, si tant est qu'il en existe un dans la boutique...
Je rencontre donc la responsable de rien à qui j'ai pu dire qu'elle faisait très bien son travail qu'il était lamentable de faire supporter le manque de professionnalisme de l'école à un enfant de dix ans, le tout sans gueuler comme un putois baryton, parce c'est bien connu, la musique adoucit les moeurs.
Elle me joue un concerto pour pipeau en adagio de toute beauté, et je quitte les lieux contrarié.

Passons. A force d'insister, miracle, les choses se sont finalement arrangées...
Il y a quelques jours, nous sommes donc retournés à la leçon de solfège du fiston. En attendant le début du cours avec lui, j'ai bien vu que ça n'allait pas fort. On s'est isolé, il a lâché ses larmes..., je lui ai expliqué que cette fois ci tout se passerait bien, qu'il avait une sacrée chance d'apprendre la musique. Un trésor inépuisable. Puis on y est retourné, il a vu un garçon qu'il connaissait, la prof est arrivée en retard, je suis parti rejoindre les filles dans la voiture.
Cette fois ci à la maison, j'ai pu finir tranquillement un Chili con carne, autre spécialité mexicaine, et le soir il est rentré avec un grand sourire aux lèvres. C'était bien!
Et en avant la musique!