mardi 18 octobre 2011

QUIMPER, ma ville


Cette ville, ce n'est pas que je l'aime. Mais je n'ai connu qu'elle. Je ne suis jamais vraiment parti. Je ne savais pas que j'avais un faible pour les belles endormies. Aurais-je commis un impair et vexé la demoiselle? Quimper, capitale de la Cornouaille, un décor noyé sous la bruine, une simple cuvette où il pleuvrait beaucoup, une ville à découvrir avec un imper sur le Q?
Qu'importe ce que disent les mauvaises langues, j'enfile mon pardessus et je pars me balader sous le crachin breton dans les ruelles du petit et charmant centre ville historique. C'est vrai qu'on en a vite fait le tour, une fois remontée la rue Kéréon, mais c'est agréable. Il y a tant de centres vils.
Les deux flèches de la Cathédrale Saint Corentin s'élèvent droit au dessus des toitures penchées des maisons à colombage. Je déambule dans les rues pavées où j'enchaîne les saveurs. Je passe en un clin d'oeil de la rue du Salé à la place au Beurre. Bien entendu, tout cela me met en appétit. Je m'arrête aux Halles pour acheter une crêpe beurre sucre chez Mme Quéau. Un régal à déguster avec et sur les doigts et inversement proportionnel au sourire de la dame. 
Je traverse l'Odet empruntant le joli pont pissette sous lequel nagent des mulets à contre courant. J'aperçois à ma gauche les marronniers en fleurs qui bordent la rivière et la devanture du café de l'Epée. Le soleil est revenu, il fait bon. Après ce repas frugal, je décide de m'allonger sur les flancs abrupts du mont Frugy où, je me rappelle avoir fait, il y a longtemps, quelques descentes vertigineuses... Des mouettes sillonnent le ciel, la mer n'est pas loin. Je dois m'assoupir un peu et lorsque je refais surface, je décide de longer les allées de Locmaria en direction du quartier du Cap Horn, m'éloignant du centre. C'est l'aventure ! Je flâne sur les bords de l'Odet qui glisse jusqu'à la mer dans un élégant silence, à peine dérangé par le discret flot de circulation. Je croise une vieille bourgeoise promenée par un chihuahua ridiculement couvert qui aboie à mon approche. La scène m'amuse et elle me jette, elle aussi, un regard hostile. C'est donc en riant que j'aperçois le toit des Faïenceries HENRIOT. Je me souviens de mon enfance et de tous les chocolats chauds lapés dans ce bol made in Quimper orné de mon prénom.
Sur une patte, un vieux gréement démâté, boude attaché au quai. C'est le Corentin, vieux bougre réplique d'un Lougre, hommage à l'époque où les bateaux et les marins remontaient l'Odet jusqu'en ville. Plus loin le chemin du halage borde la rivière qui, plus au sud vers Bénodet, mène à l'océan. L'appel du large me guette, je m'évade!
Non, finalement je reste. Quelque chose me retient ici au confluent de l'Odet et du Steïr qui, c'est amusant, pourrait se prononcer "stay here", une sorte de message subliminal en somme !
L'adolescent rebelle veut changer d'air et de famille, et devenu adulte, il revient souvent à ses racines. On n'a qu'un père, n'est-ce pas?


mercredi 20 avril 2011

Aventures nocturnes et psychologie pour enfants

Non, il ne s'agit pas de vous raconter ici mon sympathique week-end à Rennes et mes tentatives de déhanché sur le dancefloor brûlant du festival Mythos qui, comme son nom l'indique, se déroule à... Rennes. Le genre de soirée où le DJ est au top et où t'as l'impression d'avoir 20 ans, impression renforcée par le fait que tu as un peu bu la chance d'avoir les mêmes potes à tes côtés depuis tout ce temps!
Je voulais plutôt vous faire partager la nuit qui a suivi. Le genre de nuit où l'on se dit que le rôle de père est vraiment extraordinaire. Pour le coup, le roi du dancefloor avait beaucoup moins la patate! Ça rappellera des souvenirs à certains! 
Alors ça commence toujours par un couché tardif, affairé à moult conneries domestiques et malgré une  fatigue certaine.
Pleine lune oblige, le premier réveil intervient vers 3h du matin avec un petit saignement de nez de miss L. On nettoie un peu, coton dans le pif, pipi, calin, bisous et tout va bien. 

Retour au lit, tournicotti, tournicotta, et hop au moment où tu as l'impression de te rendormir, ça pleure dans les hauteurs. 4h30. C'est miss J. qui nous honore d'un bon pipi au lit.
Un vrai, hein, pas la demi pissette de libellule! Le bon pipi au lit, avec changement des draps, de l'alèse (Blaise), du pyjama, de la turbulette, un petite toilette et dodo maintenant ma chérie...
Elle : Non!
Moi : Comment ça non?
Elle : Doudou!
Moi (en mode je chuchote mais quand même je gueule un peu, dans un langage châtié) : Ben t'as aussi pissé sur Doudou dis donc (1), t'es marrante toi! 
C'est pas de ma faute s'il n'est pas étanche ton doudou, mince alors!
Elle : Doudou!
Bon, je lui explique que Doudou est sale, qu'il faut le laver pour que demain il soit tout propre et patati patata.
Elle : Doudou!
Je le lui file son Doudou au pipi
Elle (en pleurs) : Doudou est mouillé! (Elle comprend vite)
On est bien parti, je le sens!
Moi (Version entubage à deux balles) : Tiens Popi il est gentil aussi, et puis il est tout sec. 
Elle : Non, je veux Doudou! 
Les enfants sont têtus, n'est ce pas?
Conseil d'expert : Bon, quand on tente ce genre de mytho, il faut bien sûr y croire un minimum. Dans notre exemple la tâche est ardue parce que, comme chacun sait, Popi est un gros con! 
Enervement, soupirs, et autres pensées foireuses.

    Ainsi acculé, je me lance à la recherche du 2éme Doudou, la tête dans le cul. Pour alors, ça fait déjà 20 minutes que je suis réveillé, et à présent j'erre en calbut  dans cette putain de baraque en bordel en  me caillant sérieusement les miches. Bien sûr Doudou 2 a foutu le camp à pétaouchnoque!
C'est dans ces moments difficiles qu'il faut être costaud mentalement et aussi savoir faire preuve de finesse. Je reprends donc les choses en main pour qu'elle arrête de pigner après son Doudou. 
Moi : "Bon, tu veux dormir dans le garage alors?????"
Minable mais efficace. Une oasis de tranquilité pour finir la nuit!
Merci qui? Merci Françoise DOLTO!

Réveil 6h30ça pique un peu les yeux... Bizarrement, j'ai déjà hâte à la nuit prochaine!


(1) Spéciale dédicace à Mr Carlos le fils de qui vous savez et expert en boisson fruitée...

jeudi 3 mars 2011

Mon plus bel arrêt

Quand je me suis pris ce tir en pleine poire, nous en étions déjà à 7 à 0 contre nous.
Il faisait beau et je n'avais vu arriver la balle qu'au dernier moment, ébloui par le soleil et aussi un peu dans la lune. Je me trouvais donc étendu dans l'herbe, au beau milieu d'étoiles scintillantes, revivant par bribes le calvaire de cette après-midi pourtant lumineuse...
Ce jour-là, la chaleur était accablante, et bien qu'étant dispensé d'efforts intenses dans mes cages, je transpirais à grosses gouttes. Mes camarades, eux, jouaient au ralenti comme anesthésiés par la touffeur ambiante. Les rouges, en face, déboulaient sans cesse vers moi et me canardaient à la chinoise (1), tirant dans les coins, sans retenue et sans pitié. Malgré la canicule, le petit poussin que j'étais avait la chair de poule... A chaque fois ou presque, il me fallait aller chercher la balle au fond des buts, la tête basse, sous les quolibets de mes partenaires. Pendant les rares temps de répit, atterré, je priais pour que mes adversaires fassent enfin preuve de maladresse.
On m'avait collé à ce poste parce sur le terrain, j'étais un peu mou du genou. Enfin, comme joueur de champ, j'étais nul et j'avais donc atterri dans les caisses, au rebut. C'était sans doute un moindre mal, mais en vérité, j'avais une trouille bleue du ballon, ce qui faisait aussi de moi un piètre goal. Mon entraîneur ne prenait d'ailleurs pas de gants pour me le rappeler. En Angleterre on appelle le gardien de but le "goalkeeper". Moi je suis le goal qui a peur.

Mais droit devant, l'attaquant venait de transpercer une nouvelle fois la défense apathique. A mesure qu'il s'approchait, je ressentais la terre vibrer sous mes pieds et le sang battre plus fort à mes tympans. "Sors, mais sors!!!!" me criait-on. Alors qu'il armait un tir puissant, je restais planté sur ma ligne en me protégeant le visage et les roupettes avec mes gants immenses. J'esquissais à peine un geste, puis je regardais le ballon embrasser le filet noir dans un bruit sec. Sur la touche j'entendais les commentaires des parents spectateurs : "Tu parles d'une passoire celui là, quelle nouille!" 
Piqué au vif je décidai rageusement de leur montrer ce dont j'étais capable. Déjà, une nouvelle vague rouge se profilait. Me sentant pousser des ailes au croupion, je partis à l'assaut du goléador adverse, bien décidé à lui chiper la balle à la manière d'un goal volant. Mais emporté par mon élan sincère (2), je me livrai inconsidérément et fus victime d'un crochet suivi d'un grand pont. Entre mes jambes béantes fila cette balle décidément insaisissable et mes derniers espoirs de footballeur. 
C'est alors que je ressassais mes erreurs que le missile m'atteignit en plein visage version dindon de la farce. Quand je repris connaissance sur le bord du terrain, j'entendis mon entraîneur dire à mes coéquipiers : "Y'a pas à dire, c'est son plus bel arrêt!".
Ce soir-là, en rentrant à la maison avec un magnifique cocard, je décidai de raccrocher les crampons.


(1) Expression maison à caractère non xénophobe
(2) Comp...renne qui pourra!

jeudi 20 janvier 2011

Souvenirs bucoliques et autres histoires de pot au lait


J'ai passé toute mon enfance dans un petit quartier de campagne, à proximité d'une ville moyenne. Quelques maisons abritant des familles avec de jeunes enfants, des champs, des vaches, du calme entouré de plusieurs petites fermes. 
J'ai de bons souvenirs de cet endroit où mes parents vivent toujours.
J'y ai découvert le monde agricole avec le taciturne Mr Sizorn qui nous embarquait sur la remorque de son tracteur pour aller couper du maïs aux champs. Il n'avait pas d'enfant, ne disait pas grand chose, mais sur son visage buriné on pouvait lire toute la gentillesse d'un homme simple. Sa casquette grise vissée au crâne et la clope au bec, il conduisait son modeste tracteur rouge et gris avec une assurance qui m'impressionnait. Assis à l'arrière de la remorque, je regardais défiler les chemins de terre, respirant l'air breton et goûtant avec délice à ce parfum de liberté. Je me souviens de son petit rire amusé face aux questions naïves de l'enfant curieux que j'étais. Je l'aimais bien.
Mais dans ce paisible quartier j'ai aussi eu la trouille. Notamment lorsqu'il s'agissait, les soirs d'hiver, d'aller chercher le lait frais à la ferme des Sizorn. Elle n'était pas très éloignée de notre maison mais lorsqu'il fallait faire ce trajet, seul dans le noir (après avoir sans doute un peu trop traîné sur mes devoirs), je n'en menais pas large! La première étape consistait à grimper une côte avant de bifurquer sur la gauche à angle droit. Sur la droite en haut de cette petite colline, il y avait une autre ferme tenue par un homme veuf et son fils, les Cochard (un nom à coucher dehors, je vous l'accorde). Personne n'osait trop s'y aventurer, même en plein jour, d'autant que les deux énergumènes, chasseurs énervés et maladroits, avaient une fâcheuse tendance à noyer leur solitude et tout le reste dans l'alcool. Tout ça va de pair me dire-vous, on est en Bretagne! 
Un jour que ma mère nous ramenait de l'école dans sa Renault cinq orange, nous trouvâmes devant nous sur la route le fiston en fâcheuse posture. Il était monté sur un cyclomoteur mais avait toute les peines du monde à dompter sa Motobécane bleue. Il zigzaguait de façon incroyable, embrassant les bas côtés, balayant la route dans toute sa largeur, le tout au ralenti, à la limite de la rutpure. J'étais sidéré par un tel spectacle digne des meilleurs équilibristes! Lorsque ma mère finit par trouver l'ouverture et réussit à le doubler avec précaution, je fus soulagé et je me retournai aussitôt pour ne pas perdre une miette du spectacle. Le final fut à la hauteur. Perturbé par le déplacement d'air (ou ébloui par la couleur orange vif de notre Titine) notre héros imbibé s'en alla aussitôt et en douceur dans les décors, sous nos regards médusés! Bref.
Cette ferme délabrée restait donc un mystère, bien gardée par quelques chiens agressifs qui aboyaient bruyamment lorsque je passais à proximité. Je craignais en silence que l'un d'entre eux s'échappe pour se faire un délicieux dîner de mes mollets de coq. Mon autre crainte était que l'un des deux poivrots, à l'affût, me confonde avec un faisan égaré, et me fasse l'offrande d'une giclée de plomb dans le postérieur. Pan!
Ensuite, la route longeait d'épais cyprès, agités par le vent, d'où je m'imaginais voir surgir je ne sais quelle créature mal intentionnée. Pour me rassurer, je tenais fermement le pot de lait en plastique translucide, prêt à m'en servir comme d'une arme redoutable... et j'accélérais le pas.
Enfin j’apercevais un peu de lumière à l'approche de la ferme. Sauvé!
Derrière la porte coulissante de l'étable, les vaches attendaient la traite côte à côte en mâchouillant paisiblement leur repas du soir. Il régnait là une odeur un peu aigre d'excréments mais la chaleur animale était plutôt rassurante. Mme Sizorn, n'était jamais loin et venait à ma rencontre pour remplir mon pot d'un lait tiède et crémeux à l'aide d'une grande louche qu'elle plongeait dans une profonde cuve ronde en inox. Non sans un certain à propos, cette brave dame se plaignait souvent que tout allait de mal en pis... Elle arborait toujours une magnifique blouse à fleur dans les tons bleus et elle avait un tel accent que je me demandais bien d'où elle pouvait bien venir. En fait, c'était moi l'étranger!
Alors, je repartais dans le noir, encombré de ce récipient rempli d'un lait que je n'aimais pas trop, veillant à ne pas courir trop vite pour éviter la chute. 
Depuis, Mr Sizorn est mort, la ferme a été vendue, Adieu veau, vache, cochon... comme dit la fable.
Aujourd'hui dans les champs environnants il y a des chevaux... Tagada, tsoin, tsoin!
Bon, en parlant de chute, celle là est un peu désinvolte, pour ne pas dire cavalière.